Non.. J'ai pas envie d'y aller.. Je te jure que je vais bien maman !! ». Pourtant, elle n'écoutait rien de ce qui sortait de la bouche de son enfant. Pour elle, Sekizan était malade. Du moins, c'était ce qu'elle voulait faire croire à son fils. Il était trop jeune pour qu'elle lui dise les termes exactes. Un esprit maléfique rodait autour de son fils qui ne voulait plus se retrouver seul durant la nuit. Quelques fois, il disait voir des choses, des ombres qui le terrifiait. L'imagination d'un enfant diront certains, mais la situation s'était aggravé ces derniers temps, Sekizan prétendait voir des créatures qui le suivait partout. Quant à elle, rester à la maison la dérangeait, elle n'était pas à l'aise car qu'elle veuille y croire ou non.. Elle aussi avait vu des choses qui rodaient autour de son fils. C'est pour cela qu'elle était déterminé à aller au temple faire une offrande pour chasser ces esprits. Il n'y avait pas de remède pour soigner ce genre de maux, hormis la prière.

« Tu ne vas pas bien. Je t'entend crier la nuit et tu as beaucoup changé ces derniers temps. Il faut qu'on fasse une offrande au temple pour chasser tes cauchemars. » Elle n'allait pas changer d'avis.

Leurs voix venaient troubler la tranquillité des lieux vu qu'ils étaient loin très loin des fumées de la ville. Finalement.. Elle se calma en s'approchant doucement de Sekizan pour lui expliquer que c'était un mal pour un bien mais surtout que cela leur permettait de passer un peu de temps ensemble. Entre son travail à temps plein et les tâches ménagères, elle n'avait pas beaucoup de temps à accorder à Sekizan. Surtout qu'ils n'avaient personne sur qui compter, pas de maris, pas de famille. La vie que menait une mère célibataire était loin d'être facile. C'était déjà un miracle qu'ils ne se retrouvent pas à la rue. Mais ça, Sekizan était bien trop jeune pour le comprendre. Il se rendra compte bien plus tard dans le futur que sa mère était un véritable héro. Une mere qui ne voulait surtout pas perdre la prunelle de ses yeux, Sekizan. Sa tendresse réussit à calmer ce petit homme qui se plaignait partout. Le jeune garçon finit par abdiquer.

Ils marchaient depuis quelques temps maintenant. Un trajet qui paru interminable pour Sekizan. C'est sans doute pour cela que maman avait choisi de quitter la maison très tôt le matin. Elle en avait honte.. Elle qui autrefois voulait devenir prêtresse n'avait plus foulé ces temples depuis des années. C'était peut-être pour cela que le destin désirait la punir en s'en prenant à son fils. Elle allait se repentir.. Un enfant n'avait pas de crime. Le châtiment lui revenait.. Et non à Sekizan qui n'avait rien fait. Son âme s'apaisa lorsqu'elle arriva à Gion. Quant au petit garçon, lui aussi paraissait subjugué par toutes ces structures de l'ancien temps. Le simple fait d'être arriver ici rendait le petit garçon heureux. Obnubilé par ces temples magnifiques.

Toutefois, la maman, elle ne paraissait pas impressionner. Ce n'était pas la première fois qu'elle venait ici. Et bien vite, elle dit à Sekizan de la suivre. Sans rechigner, il la rejoignait un peu plus loin. Alors qu'elle pénétrait déjà le temple, elle retira ses chaussures avant de prendre place devant une immense statue en silence. Sans trop comprendre ce qui était en train de se passer, le garçon fit de même. Elle vit que Sekizan ne priait pas, alors elle allait briser le silence avec ses mots.




« Prie. »
« Oui m'man.. »

Les secondes passaient.. Puis se transformaient en minute, mais Sekizan n'arrivait pas à prier. On peut dire qu'on ne le lui ait jamais appris non plus. Il restait muet, assis devant cette statue qui le mettait mal à l'aise. Que pouvait-il bien dire ? Il l'ignorait.. Sekizan aurait bien voulu faire plaisir à sa mère mais il ne savait pas ce qu'il faisait ici. Le petit garçon sentait aussi qu'on l'observait.. Il leva les yeux, et son visage se décomposait. Son bourreau était au fond de la salle à l'observer timidiement. Avertir sa mère aurait été la meilleure des solutions mais il ne trouva pas ce courage, du moins, il ne voulait pas importuner sa mère dans sa prière. Ce monstre à trois yeux l'epiait du regard, et il avait peur que cette chose s'approche et lui fasse du mal. Cette chose le suivit jusqu'ici, il ne savait pas quoi faire. Alors il s'abaissa plus bas que terre devant la statue divine en commençant à prier de toute ses forces, les mots qui sortaient de sa bouche n'avaient aucun sens. Il demandait la clemence d'un être supérieur dont il ignorait l'existence..

Son cœur battait toujours plus vite, il pensait que plus il priait, plus cette chose qu'il voyait irait loin. D'ailleurs, il commençait à pleurer, sa mère ne le voyait pas. Quelques goûtes de larmes coulaient le long de sa joue avant de retomber sur le sol. Sekizan n'était qu'un petit garçon fragile, déjà qu'il détestait aller à l'école à cause de ses camarades de classe qui ne cessaient de rire de lui. Et maintenant ça, il avait peur de ces créatures, il les voyait chaque soir aux pieds de son lit. Pour un gamin, c'était un cauchemar, et il semblait être le seul à voir ces choses. Sekizan désirait fuir le plus loin possible malgré la présence de sa mère. Puis, des bruits de pas résonnaient par derrière, quelqu'un venait d'arriver. Au son de la voix, c'était une femme.

« Dit moi mon garçon.. Il t'arrive de voir des choses comme des créatures horribles la nuit ..? » demanda-t-elle.

Sekizan se retourna avant d'apercevoir une femme en kimono, elle souriait, comme si c'était normale pour un enfant de 7 ans de voir ce genre de chose et que cela le suive partout. Le petit garçon hocha la tête sous le regard incrédule de sa mère face à l'arrivée de cette prêtresse. En vérité, elle avait vu le fléau penetrer à l'intérieur du temple en suivant Sekizan, la question de savoir si oui ou non Sekizan voyait aussi cette chose importait peu. Car souvent, c'était une réponse négative, peu de gens pouvaient voir les fléaux et la prêtresse le savait. En soi, elle attendait une réponse négative, mais à sa grande surprise, Sekizan confirmait qu'il voyait bien cette chose qui rodait autour de lui.

Ce fléau était tout d'abord née de la peur de Sekizan envers ses camarades qui le maltraitait en classe, et il le suivait partout où il allait. Cette accumulation d'émotion négative donnait naissance à cette chose horrible, mais ça il ne le compris qu'en grandissant. L'accumulation de ses peurs, de ses pleurs ainsi que son angoisse étaient à l'origine de cette chose. La prêtresse ignorait d'où provenait ce fléau mais elle était surprise lorsqu'elle appris que le petit garçon pouvait voir cette chose. La matérialisation des peurs d'un seul enfant ne pouvait donner naissance à un fléau haut gradé, c'est pourquoi elle exorcisa la chose avec une facilité déconcertante. La mère de Sekizan était resté silencieuse, mais lorsqu'elle vit son fils reprendre des couleurs et sourire, elle fut si heureuse qu'elle l'embrassa. Quant au petit garçon.. Il était subjugué par cette femme en kimono qui l'avait délivre du mal. Délivré du mal et l'ignorance. Car oui, elle allait lui apprendre bien de chose.

Avoir peur donnait naissance à des choses aussi abominable ? Les fléaux puisaient leur force dans la peur, une peur qui paralysait et affaiblissait ceux qui étaient saisis par elle. À partir de cet éclair de compréhension, la peur n'avait plus de prise sur lui. Elle avait été bannie de son être, reléguée au rang d'ennemie à combattre. Son caractère, sa façon de voir les choses venaient de subir un changement drastique. Son âme refusait de se faire écraser davantage par cet intru qu'était la peur.