La convalescence était finie ! Pour fêter ça, Ibara s’était permis un seul, UN SEUL, fast food. En plus, ce n’était pas juste, parce que la branche japonaise de mcdonald avait sorti une campagne de pub trop mignonne qui lui donnaient envie d’en manger un depuis des semaines, des mois mêmes. Alors autant profiter de l’occasion. C’est ce qui se rapprochait le plus d’un jour de vacance pour elle, et même si elle avait peur de vite retomber dans de mauvaises habitudes de nutrition, elle considérait ses rares jours de repos un “cheat day”.

La queue était assez longue, ce qui lui laissait le temps de regarder son téléphone, rattraper certaines de ses lectures, envoyer des messages à ses amis… Ha, si elle en avait, bien sûr. Quoique, elle en avait deux maintenant. Elle pourrait toujours leur demander s’ils étaient partants pour un peu de mal bouffe. Mais alors qu’elle allait envoyer le message et sortir de la queue, son téléphone fit un petit bruit. Un message, plus particulièrement une demande de mission. Si tôt ? Et bien, pourquoi pas, elle ouvrait donc le message avec presque de la joie, avant qu’en ne le lisant, sa mine ne change d’un coup.

Est ce que cette mission lui avait été donnée pour lui faire passer une sorte de message ? Si c’était le cas, quelle idée de l’envoyer à elle. On trouve rarement plus fidèle à l’ordre occulte que Homura Ibara. On pouvait même parler de fanatisme. Lorsqu’elle a reçu la mission, et lorsqu’elle l’a lu, tout ce qu’elle a ressenti, c’était du dégoût pour cette famille de macaque, ni plus ni moins. Peut-être était-ce parce qu’elle avait un biais avec les mères de familles, pour des raisons évidentes, mais celle-là n'avait que ce qu’elle méritait.

Maintenant que ce rapport est lu de long en large, cette situation porte beaucoup de ressemblance avec la nouvelle de H.P. Lovecraft, “la couleur venue d’ailleurs”. Si ce n’était que les protagonistes de cette nouvelle horrifique avaient l’excuse de ne pas être responsable de leur malheur, et des propriétés spéciales de cette “couleur”. Pour cette famille ? Aucune sympathie, quel genre de fou laisse une femme trainer une couverture avec un fétus mort-né dedans. Toutes les conditions étaient remplies pour la naissance d’un fléau, et ils n’avaient qu’eux à blamer.

“Bonjour, vous prendrez ?”

Oh, c’était son tour. Mh, elle avait un partenaire sur cette mission, non ? Elle allait lui prendre quelque chose à manger aussi. Son nom ne lui était pas étranger, en même temps, il fallait bien retenir le nom des psychopathes qui traînaient dans l’organisation, encore plus lorsque l’on en était une. Hanzo Sanada, c’est ça ? Qu’est-ce qu’il pouvait bien manger, bah, elle allait lui prendre un bigmac frite boisson et puis basta. En-dehors de son nom, elle ne connaissait pas grand-chose de lui en fait. Ah si, il était aussi un invocateur. Donc c’est ça de point commun.

En l’attendant devant leur lieu de mission, elle put remuer un peu plus ses méninges, et combler les trous en l’observant arrivée. Est-ce qu’il n’était pas l’un des quelques exorcistes à rester toujours dans son coin ? Un peu comme elle donc. Il avait une aura assez similaire à celle de Haru en tout cas, un air semblant indiquer que tout air et salive utilisé pour interagir avec autrui était un gâchis. Décidément, Ibara n’avait pas de chance avec ses partenaires de mission. Après, était-elle vraiment mieux, ça c’était dur à dire.

Elle croquait dans sa nourriture, son regard carmin plongeant dans les yeux de ce qui semblait être un médecin de la peste moderne. Il avait un regard fortement similaire au sien, il avait dû voir beaucoup de gens mourir, ou alors a vu quelqu’un d’important y passer, un peu comme elle. Dur à dire, il pourrait tout simplement être né sociopathe, mais cela ne changeait pas qu’elle aimait bien les gens ayant ce regard. Ils étaient plus faciles à comprendre pour elle. Elle avalait, avant de demander.

“Tu as déjà mangé ?”

Drôle de réponse à la question “prête”, certes, mais elle n’avait pas fini de manger, et avait acheté de quoi nourrir son partenaire, autant lui proposer. S’il en voulait, elle allait simplement finir son repas et attendre qu’il finisse le sien aussi en sirotant son thé glacé, dans le cas contraire, une main portera le sac, et l’autre lui servira à siroter. Mais avant d’entrer, elle avait tout de même une question pour lui.

“Lesquelles préférerais-tu éviter. Où t’en occuper.”

Si elle utilisait le pluriel, ce n’était pas pour parler du fléau, mais des résidents, de la charogne ayant permis à ce parasite de subsister, et de se nourrir comme un gros porc. Ibara était très, très laxiste sur ce qu’elle pouvait tuer ou non. Du moment que ce n’était pas un exorciste, elle pouvait le faire si on le lui ordonnait. Qu’il y ait des enfants dans cette maison ne changeait rien, au final. On lui a ordonné de dératiser cet endroit, et elle allait le faire. La sorcière faisait néanmoins preuve de considération pour son collègue, elle avait bien réalisé de la plus dure des manières que tout le monde n’avait pas autant de détermination qu’elle de ce côté-là.

“Mh ? Et bien, le fléau est probablement avec elle, donc si tu veux t’en charger, fais attention.”

Elle ne s’attendait pas vraiment à ce genre de demande, mais il faut bien s’attendre à l'inattendu quand on travaille pour l’ordre. Cela ne serait pas la manière pour opérer la plus farfelue qu’elle ait découverte en écoutant les rumeurs qui pouvaient circuler sur ses collègues. Mais pourquoi spécifiquement la femme ? Bon, mieux ça que les enfants, elle imagine, mais bon, elle espérait qu’il n’y avait rien de trop… Spécial, dans cette requête.

Il ne restait donc plus qu’à ouvrir la porte, la sorcière posait la main sur la poignée, fermée, évidemment. Mais ce n’est pas une porte qui allait bloquer un exorciste. Elle semblait attendre un peu devant la porte, puis cette dernière s’ouvrit, laissant la maison libre d’accès, avec pour simple preuve de ce qui s’était passé, un petit dragon végétal avec une clé dans le bec. Petit dragon qu’elle caressa une fois son travail terminé.

“On se retrouve ici dans quoi, vingt minutes ? Tu as besoin de plus de temps pour un fléau de rang 2 ?”

Hanzo baisse les yeux sur le burger de sa collègue. L'intention est bonne. Sauf si elle a déjà entendu parler de lui. Auquel cas, c'est de la provocation. Hanzo préfère rester sur la première option pour le moment. Après tout, lui même ne la connais pas.

Pour Hanzo, qui est un maniaque de la propreté, jamais il ne lui viendrait à l'esprit de se nourrir dans un fast food au vu des conditions d'hygiène déplorables à l'intérieur. Dans les cuisines où la sueur se mêle à l'huile, où les jeunes employés sans une once de respect enlèvent des cornichons avec leurs gants sales, font tomber maladroitement des frites par terre et les remettent dans leur boîte comme si de rien n'était, où les machines à boissons sont crasseuses et pas assez entretenues ... Dans l'esprit d'Hanzo, les raisons de ne pas consommer dans ce genre d'établissement sont nombreuses.

Ses yeux se plissent alors, devant l'horrible spectacle qui se déroule devant lui. Le machin ne ressemble même pas à un burger digne de ce nom. Il n'y a aucun professionnalisme, c'est du foutage de gueule. Comment les jeunes peuvent adorer ce genre de machin ? Seulement parce que c'est rapide ? Non, certains trouvent ça bon. De nos jours, ils s'enferment dans la médiocrité sans s'ouvrir à ce qui est vraiment bon. Et là c'est factuel : ceux qui s'occupent de cette nourriture ne sont même pas dignes de se faire appeler chef ou cuistot.

"Ouais. Mais je mange pas ces trucs là, de toute façon."

La voix est blasée et lasse. Pas parce qu'il la prend de haut avec sa bouffe, seulement parce que c'est son ton habituel : il faut s'y faire, et ça peut parfois être agaçant. Couplé à ce qu'il vient de dire, nul doute que ça peut en énerver plus d'un. Hanzo n'en a rien à foutre, cependant. Il n'a jamais été là pour se faire des amis. Dans l'ordre, du moins. S'il s'entend bien avec Ibara, c'est tout bénef pour lui, mais il ne forcera pas non plus.

"Tout le monde."

Eviter tout le monde, bien sûr. Hanzo tente une blague, mais elle est dite avec si peu de conviction et d'inspiration dans la voix qu'elle ne semble pas faire mouche. Hanzo s'en fout. La vanne, il l'a sorti autant pour lui que pour Jack. Mais Jack, a l'intérieur de sa tête, ne rigole pas. Il n'a plus son camarade de jeu habituel pour lui tenir compagnie. Pas que ça le dérange, mais il ne croit pas à son départ, ou à une paix d'un jour, pendant une seule seconde. Il sait que le tueur se prépare. Il sait que le tueur anticipe. Il doute quelque peu, du coup. L'éventreur n'est déjà pas quelqu'un de franchement fréquentable, si en plus il s'agit d'un calculateur ... C'est quelque chose qui peut se retourner contre lui. Il ne contrôle pas Jack, alors il ne sait pas de quel manière il peut réagir. Lorsqu'il connaît bien la personnalité qui se manifeste, il ne se fait pas trop de soucis, mais quand il est dans le flou ainsi, il ne peut s'empêcher d'appréhender. Il a l'impression de le voir partout. Derrière chaque arbres, chaque maisons, chaque coins de rue.

Il réfléchit alors un instant. S'il trouve la mère, qui est la source de l'énergie du fléau, vraisemblablement, il peut en tirer quelque chose. Soit la raisonner, soit s'occuper d'elle avant qu'elle ne s'échappe. De ce qu'il en a entendu, Ibara est une invocatrice ... Bourrine. Lui peut invoquer le summum du maître de l'assassinat. Celui qui à échappé à l'histoire pour intégrer le mythe. Celui qui peut s'occuper en un éclair de sa cible, et repartir les mains dans les poches.

"La mère. Je vais essayer de chercher la mère."

Il y a des enfants, aussi, et le médecin de peste ne l'a nullement oublié. Eux aussi, il tentera de les aider du mieux qu'il peut. Soigner les malades, d'une manière ou d'une autre. La mort est la fin de la maladie, en soit. Bien sûr, il ne veux pas en venir là. Est-ce qu'il a le choix ? Si ce n'est pas lui, c'est quelqu'un d'autre. Peut-être qu'il peut aider à trouver une échappatoire. Peut-être qu'Ibara sera occupé avec le fléau. Il ne sait pas comment aborder la mission. Il ne sait pas comment il va réagir, une fois qu'il devra prendre une décision.

Ibara s'est déjà mise en marche, acceptant sans broncher sa condition. Hanzo regarde la rue déserte une dernière fois, puis fais quelques pas également, pour se retrouver devant la porte. Il entre, sans s'arrêter.

"Hmpf."

Il prend comme une blague la dernière remarque de sa camarade, et tourne à droite immédiatement, anticipant le fait qu'Ibara ira dans la pièce de gauche. Car à l'entrée, il n'y a rien. L'ambiance est austère, aucune lumière ne passe avec les volets fermés, l'obscurité semble dominer l'ensemble de la demeure. Il va falloir faire preuve de prudence. De ce qu'on lui a dit, le machin est furtif. En même temps, un fléau de mort né, ça a de quoi faire flipper. Si ce n'est pas si létal, c'est au moins bien dégueulasse. Et horrifique.

Hanzo a passé l'âge d'être effrayé par un gosse, surtout avec ce qui traîne dans sa tête.

A droite, il tombe sur une large salle a manger. La table est mise, le repas entamé. Pas fini, nonobstant. Ils sont partis précipitamment. Il les ont entendus arrivés ? Vu arrivés ? Non. Les volets sont fermés. Ils bouffent dans le noir ? Hmpf. Le fléau les a peut-être prévenu. S'il se sert de leur énergie vitale, il ne veux pas perdre sa source de pouvoir. Peut-être que l'influence du fléau leur a filé de l'énergie. Non. Quelqu'un est arrivé là avant eux ?

Hanzo est tellement suspicieux de tout qu'il peut s'imaginer toute forme de scénario. Après tout, il faut être paré à toute éventualité : c'est un professionnel.

Il entend du bruit, derrière lui. Dans le couloir sombre qui le mène à d'autres pièces. Vers d'autres ténèbres. Il ouvre sa veste et en sort son Uzi, accroché a l'intérieur de son manteau. Et il s'avance vers sa prochaine destination.

Est-ce que son partenaire de mission faisait particulièrement attention à son alimentation ? C’était un peu rude, mais elle n’allait pas juger quelqu’un sur ses habitudes de nutrition, elle était très mal placée pour ça, étant une ancienne foodie.

“Mh, tu fais bien, c’est moins bon que dans mes souvenirs, mais ça m’en rappelle des pas complètement terribles.”

Elle ne s’attendait pas à ce qu’il comprenne ce qu’elle baragouine, ils avaient plus important à faire de toute manière. Ils entraient dans le nid de la bête, à proprement parler, l’antre du fléau. Et quel putride antre, c’était. Plus aucune énergie n’était dédié au ménage, la maison pourrissait sur elle-même, et la raison était facile à découvrir si on avait lu le dossier.

Les résidents n’avaient tout simplement pas d’énergie à ça. Elle était aspirée par le fléau à un rythme atrocement lent, presque imperceptible en vérité, parce que ce n’était pas temps leur énergie qu’il aspirait, que l’énergie occulte qu’ils émettent. Les non-exorcistes ne contrôlent pas leur énergie occulte de la manière d’un exorciste, ils suintent littéralement d’énergie, et c'est comme ça que leurs émotions amènent à la création de fléaux.

Dégueulasse. Tout simplement répugnant, mais c’était un sort mérité par ces sous-races. Ils n’avaient qu’eux à blâmer, maintenant qu’ils ont laissé les rats se reproduire chez eux, les dératiseurs ne feront pas pitié. Son partenaire se décidait à aller à droite, Ibara pris donc la gauche, menant directement à un escalier. Elle allait donc devoir s’occuper de l’étage, là où les chambres se trouvaient probablement.

Donc, elle allait commencer par la partie la plus compliquée de cette mission. Est-ce qu’elle l’avait déjà fait avant ? Tuer des gens ? Nooon, elle l’a déjà fait voyons. Tuer un enfant, par contre, c’est nouveau. Cela ne lui fait pas si peur, comment un enfant pourrait lui poser un problème ? C’était cette absence de peur face au tabou qu’elle allait commettre qui la perturbait. Parce qu’ils n’étaient pas exorcistes ? Non, parce qu’on le lui avait demandé.

L’ordre occulte a mis une cible sur la tête de ces gens, Ibara ne demandera ni pourquoi, ni comment. Elle s'exécutera. Cela ne la dédouane en rien cependant, après tout, et probablement comme l’a dit ce fichu Sato, il y a mille chemins qu’elle pourrait prendre pour éviter d’en arriver là. Mais elle allait les ignorer, tous.

La sorcière s'arrêta, non pas qu’elle rencontrait un cul-de-sac, mais elle avait entendu quelque chose. Un murmure, une respiration rapidement étouffée, le froissement de vêtements et le claquement de deux petites mains sur la bouche. Cela surprenait Ibara d’avoir entendu tout ça, sa fierté était sa vue, pas son ouïe, même si ce dernier n’était pas en reste. Cela voulait dire long sur le silence de cette maison de mort, et sur la concentration d’Ibara. Elle se sentait plus bête qu’humaine une fois qu’elle avait réalisé ça, mais maintenant qu’elle l’avait entendu, et vu le placard servant de cachette à celui ayant fait cette grave erreur, elle ne pouvait pas faire machine arrière.

“... Nourrice.”

C’était réglé rapidement, et Ibara changea de pièce pour continuer le dératissage. Plusieurs questions commencent à revenir à son esprit, maintenant qu’elle pouvait se concentrer comme une humaine à nouveau. Comment cela se faisait qu’ils s’étaient déjà cachés, la manière d’infiltration de la dragonnière était discrète, et son dragon n’a rien vu d’humain… Elle n’aimait pas ça. Est-ce que le fléau a senti l’énergie occulte des deux exorcistes ? Quelle perception affûtée alors, et quelle étrange manière d’agir. Ce parasite devait vouloir garder ses repas à l’abri, une étrange attention pas bien différente que le berger s’inquiétant de la santé du mouton qu’il allait abattre le lendemain.

Percevoir ainsi des invocateurs sans qu’ils n’usent de leurs invocations, c’est du travail d’orfèvre. Mais dans ce cas, est-ce que cela ne voulait pas dire qu’il aurait pu se préparer à leur rencontre ? Si. Elle le réalisait en sentant ses alarmes internes crier comme si le monde s’écroulait sous ses pieds. En vérité, rien de si grave ne se passait, mais l’ordre d’importance des menaces de la sorcière est mal foutu.

“Mh, quel étrange fléau quand même. Il a une vision bien particulière de sa nourriture.”

Elle parlait seule, parce que même si un homme, probablement le père en vérité, avait essayé de la tuer dans une attaque surprise au couteau, ce n’est pas ce genre d’attaque qui pourrait la tuer. Quoique, peut-être ? Si elle ne faisait pas attention, et qu’elle n’avait pas conscience de l’attaque. Dans son sommeil, il aurait eu une chance, mais lorsque sa mère avait essayé, elle s’était plantée en beauté. aha… Ce n’est pas bien de rire de ça.

“Oh, peut-être qu’il n’a pas vraiment un contrôle sur son bétail, juste une vague influence ? Cette influence les aurait prévenues d’un danger, et ils auraient agi comme ils l’auraient fait normalement ?”

Quelle tristesse, ce fléau devait être particulièrement faibles alors. Son partenaire devait s’en sortir comme un chef alors.

Oh, apparemment, Hanzo a trouvé sa proie. Et des cris que la sorcière pouvait entendre… Ouais, il devait faire partie de ces genres de membres. Elle ne jugeait pas, elle ne pouvait pas juger, mais quand même, elle grimaçait. Est-ce qu’il y avait besoin de prendre autant de temps pour égorger un porc ? Ses couinements lui vrillaient les tympans.

Ses hurlements avaient néanmoins un avantage. Cela a eu le mérite de perturber suffisamment la troisième proie pour qu’Ibara puisse la trouver, lui permettant ainsi dans les secondes qui ont suivi de terminer la première partie de cette mission. La nourriture était maintenant éradiquée, il ne fallait que s’occuper du goinfre. Un deuxième bénéfice du sadisme supposé de son partenaire, c’est qu’il permettait à la sorcière de facilement le retrouvait, même si elle allait devoir descendre au rez-de-chaussé pour le rejoindre.

“Aucune pensée pour les pauvres innocents que tu laisses pourrir à l’étage ?”

Ibara grimaçait, évidemment, elle l’entendait. Après avoir utilisé nourrice pour l’éradication, elle aurait été surprise de ne pas entendre la voix de ses péchés, de sentir le poids de ses remords sur son dos. Elle secouait la tête, il n’y a rien à se reprocher, elle n’est pas réelle, si ce n’était pas elle, quelqu’un d’autre l’aurait fait, plus que tout ça, c’est une bonne chose qu’ils soient morts de sa main, plutôt que de celles du fléau qui les parasitait.

“Plutôt une mort rapide, que de les laisser devenir un nid et un garde-manger pour ces pourritures.”

Elle entendit un ricanement, alors qu’elle atteignait à peine les escaliers. Il était loin d’être joyeux, plutôt rempli de contentement, le rire de quelqu’un voyant le scénario qu’il avait prédit se défiler devant ses yeux. Évidemment qu’elle l’avait prédit, elle était dans sa tête, elle était sa tête, un vestige de son subconscient que la thérapie n’a pas réussi à vaincre, et qui s’en est trouvé renforcé lors de son dernier combat.

“Cela n’a pas l’air rapide, ce qu’il se passe en bas. Mais quelle importance, un meurtrier aux bonnes intentions reste un meurtrier. Pas qu’épargner ces gens aurait fait de toi quelqu’un de bien, tu n’en es pas à ton premier rodéo ma chérie.”

“Tu aurais dû rencontrer ce sato de ton vivant, lui et toi faite la paire, maintenant laisse moi tranquille, j’ai une mission à finir.”

“Oh oui, cet exorciste aurait probablement aimé me rencontrer aussi. Qui sait, peut-être qu’il est attiré par les monstres comme nous, il insiste à vouloir t’envoyer des messages, et tu n’as pas l’air de le refuser.”

Touché. Mais si elle continuait de lui répondre, non seulement elle passerait pour une folle auprès de son partenaire, mais également elle n’en finira pas de la hanter. En ne répondant pas, elle remarqua que le silence était tombé, à peu près au moment où elle arrivait au rez-de-chaussé. Il en avait fini ? Tant mieux, elle préférerait ne pas le voir durant l’acte, cela serait compliqué de lui parler sinon. Mais le silence ne durait pas longtemps, elle s’avançait en direction de la seule pièce illuminée du couloir, mais très vite elle entendit un nouveau cri. Ce n’était pas celui de la femme, mais plutôt la voix de son partenaire qui criait à quelqu’un, ou quelque chose, de ne pas le toucher, puis à un certain “Jack” d’agir.

Elle avait cru comprendre que comme elle, il était un invocateur, mais son invocation s’appelait Jack ? Bon, est-ce que la meuf avec “Gardien”, “Servants” et “Nourrisse” pouvait juger… Non, mais elle le fera quand même, un tout petit peu. Avant qu’elle ne puisse aller le rejoindre néanmoins, un boom sonore. C’était tout ce par quoi elle pouvait décrire ce qu’elle avait entendu. Un cri tellement fort que ses oreilles sifflaient, mais ce n’est pas ça qui allait lui faire ignorer l'atrocité qui se précipite vers elle.

“Gardien !”

Un peu à l’étroit dans ce couloir ? Ce n'est rien, il lui suffit d’écraser l’insolente créature qui cherchait à poser ses sales pattes sur son invocatrice, pour ça, il n’a besoin que de la fouetter de sa queue pour l’envoyer contre un mur. Hanzo arrivait, et avec lui un homme - un très bel homme - Qu’Ibara assumait d'être “Jack”. Ses yeux ne la trompaient pas, ce n’était pas un humain.

“C’est ça le fléau ? Ils avaient besoin d’envoyer deux exorcistes pour ça…”

Qu’est-ce qu’était cette chose, un embryon ? Oui, ça avait l’air d’être ça… Pourquoi est-ce qu'il ne disparaissait pas ? Gardien l’avait percuté de plein fouet, il ne pouvait pas survivre avec un corps aussi frêle et si peu d’énergie occulte… Oh, oh non. Il a trompé la sorcière, il n’est pas aussi faible qu’elle l’avait pensé, son énergie grandissait à vue d'œil, et en un instant, il est sorti de son champ de vision. Il a grandi spontanément, évolué, même, on peut dire là, et maintenant, il était sur l’épaule d’Ibara, et avait fini d’inspirer.

Boom, un nouveau cri, plus strident, à bout portant ? Non. Contrairement à son collègue, la sorcière n’avait pas de limitation auto imposée sur ses invocations principales, elle pouvait en invoquer deux à la fois sans problème. Pour se défendre, elle a fait appel à la nourrice, qui a entouré le fétu dans une sphère de ronce pour atténuer le cri. Malheureusement, le cri l’avait détruit, et il était sorti de sa prison, mais cela évitait à Ibara de finir sourde.

“D’accord, j’ai mérité celle-là. La prochaine fois, je ferme ma gueule.”

Elle claquait dans ses mains pour faire disparaître le gardien, ses servants prenant le relais, étant bien plus à l’aise dans les espaces étriqués comme un couloir. En restant attentive, elle se rapprochait petit à petit de Hanzo, ayant vu le uzi dans ses mains, mieux valait qu’elle reste proche de lui pour ne pas se retrouver dans sa ligne de tir et lui crée un angle mort.

“Tu m’entends ? On ne dirait pas. Jack ?”

Hanzo ne répondait pas, probablement que le premier cri qu’elle a entendu lui était destiné, et que son invocation n’a pas pu le protéger, voir même qu’elle en est incapable. Ibara réalisait bien que ses dragons avaient beaucoup d’options défensives, comparés à leurs capacités offensives. Si bien que pour avoir une attaque décente, elle devait utiliser son sort étendu. Mais cela changera bientôt. Elle pouvait le sentir. Pour l’heure, elle devait rester sur ses gardes, et s’occuper de ce bâtard bruyant.

Ibara fait son entrée. Hanzo est bien content de la retrouver. Elle est efficace : quand il a besoin d'elle, elle débarque. Le cri de la mère l'a sans doute alerté, mais elle n'a pas l'air effrayée de ce qu'elle a entendu. Il note son professionnalisme : elle semble être comme lui, de ce qu'il en voit a l'instant, car si on se fie aux paroles d'Haru, c'est tout ce qui lui manque. Peut-être s'est-elle améliorée depuis. Il ne note pas grand chose d'autre, cependant, tant l'ouïe lui fait défaut. Il note bien qu'elle essaie de communiquer, mais il ne trouve rien a rétorquer, même s'il parvient à lire sur les lèvres. Ce n'est pas le cas de son invocation, en revanche, qui entend parfaitement ce que leur alliée leur déclare.

Mais croyez le ou non, ne rien entendre à ses avantages, celui de se baser sur ses autres sens. Hanzo entend un fond de brouhaha : les paroles de sa collègue, le remue ménage des dragons, ce qu'il considère être le bruit de glissade dégueulasse du gosse. Et puis, soudain, ses yeux se pose aussi rapidement que l'apparition du fœtus sur l'épaule d'Ibara. Il a à peine le temps de dire "attention" et de lever son Desert Eagle que le bébé est recouvert de ronces avant le moment fatidique. Avec un choc sonore aussi puissant, il se demande même s'il n'a pas implosé dans le cocon formé par le dragon d'Ibara. Mais c'est l'inverse qui se passe soudainement : la prison roncière vole en éclat, le bébé se casse une fois de plus. Hanzo tente une fois de plus de le suivre des yeux, mais ça semble peine perdue, d'autant qu'il file entre les pattes des dragons.

Il reporte son attention vers la sorcière, qui tente d'entamer un dialogue. Il ne comprends toujours pas un traitre mot de ce qu'elle dit, et il se contente de froncer les sourcils un maximum, de se masser les oreilles, et d'ingurgiter sa salive comme s'il était dans un avion. En vérité, ça commence à faire de plus en plus effet. Jack, en revanche, se révèle bien plus barbare. Prenant le bout de son chapeau de ses doigts fins, il le décale à l'emplacement de son coeur, dans une légère révérence pour saluer son interlocutrice.

"Mademoiselle. Nous ..." il tousse "Je me suis occupé de la mère de famille, quand ce petit avorton nous a pourchassé. Malgré sa petite taille, il est bien loin d'avoir froid aux yeux. J'ai ... Analysé le corps de la maîtresse des lieux, et je suis heureux - ou au regret, si vous souhaitiez vous exercer - de vous annoncer qu'elle ne contient pas plus de fléaux ! Excusez moi mais, si j'ai déjà cru comprendre la nature de votre le sort, y assister aux première loges est une toute autre aventure ! Vous avez élevée la catégorie des invocateurs au rang d'artistes !"

Les Jack ont toujours été de beaux parleurs, mais celui-ci est un maître dans l'art, littéralement. Après tout, il est sensé connaître les codes de conduites qu'un noble se doit de suivre : en tant que docteur et sans doute majordome d'une famille royale, il a été bercé par une éducation distinguée. Hanzo le laisse prendre la première place, et sans que son sort n'ai besoin de le mentionner, son regard s'attarde également sur les dragons. C'est franchement utile, comme sort d'invocation. Peut-être même l'une des meilleures possibles : dans tous les mythes, ce sont les dragons qui sont les plus populaires, généralement. Il y a tellement de façon de les imaginer, qu'il se demande jusqu'où une telle technique peut-être développée. Même s'il n'est lié qu'à un seul élément - ici, le mot d'ordre semble être la rose - on peut en créer des centaines sur le thème en question. Et si Hanzo trouve ces créatures fascinantes, il lui vient la pensée de savoir s'ils peuvent être mangés. Avec une telle carapace et une telle peau, l'intérieur doit être bien protégé, bien qu'il se doute qu'un dragon doit sentir fort en bouche. M'enfin, il doutait pouvoir demander une telle chose à la rouquine un de ces quatre.

"Ouais, joli sort."

Il le murmure de manière presque imperceptible, comme pour lui même, mais cela lui fait réaliser que ses oreilles reviennent à la vie petit à petit. Et soudain, du couloir derrière lui, un bruit horrible parvient jusqu'à lui, un genre d'assourdissant suçon, de raz de marée boueuse, de pleurs décuplés d'un morveux, de tambour battant, le tout rassemblé en un seul et même son. S'il était amateur de Lovecraft, il dirait tout simplement que c'est un bruit qui ne peut être décrit selon les standards humains. En fait ça le peux, puisque toutes ces descriptions lui ont traversés l'esprit, mais c'est juste que c'est trop ignoble pour qu'il s'en rappelle plus longtemps.

Et puis il entend quelque chose glisser, comme si on lavait le sol, et le plancher grincer sous le poids de ce qui se trémousse dans le couloir qu'il venait de quitter, donnant sur la cuisine. Même quand on l'attaque pas, le machin continue de grossir. Et soudain, il apparaît devant les deux membres de l'ordre occulte. C'est un peu comme si Jabba le Hutt avait une bouche grande ouverte, littéralement de sa tête jusqu'au sol. Une erreur de la nature, voilà ce que c'est qu'il contemple actuellement. De toute sa carrière, Hanzo place ce fléau dans le top un des plus horrifiques qu'il a vu de sa vie. Le bébé est toujours un bébé, mais ici, il est aussi grand que lui. Il ne perd pas une seconde.

"Jack."

"Monsieur."

"Ibara, couvre toi."

Uzi et Desert Eagle levés.
Ciseaux ouverts.

Les deux hommes sautent sur leurs côtés du mur. Il a vu le dragon revenir à sa maîtresse lorsqu'elle a claquée des doigts, il a vu la bulle de ronce la protéger du petit garnement, il sait que la défense est un point fort de son sort, mais il la prévient tout de même que son prochain mouvement la laissera a découvert.

Le monstre, de son côté, est bien plus rapide qu'à l'accoutumée. Hanzo a à peine le temps de suivre sa vitesse, mais il tire à l'instinct de son Desert Eagle. S'il le touche dans le dos, cela ne semble pas vraiment faire tressauter le fléau : il lui faudra plus d'une balle pour se plier. Jack fait un saut moins grand et se retrouve juste derrière le gros bébé, le plantant de plusieurs coups de ciseaux dans le dos. Hanzo essaie d'accourir pour en finir vite, mais il n'a même pas le temps de lever un pied qu'il est stoppé : la substance que le fléau à laissé dans son sillage le maintient immobile. Il pourrait forcer pour s'en extraire, mais il n'a pas le temps. Dans le même temps, le fléau se retourne d'une manière impossible à comprendre vers le meurtrier de Whitechapel, qui a peut être donné trop d'enthousiasme dans son oeuvre. Hanzo lui hurle de se baisser, ce à quoi son sort s'exécute. Le fléau inspire. Hanzo recharge. Utiliser la mitraillette offrirait plus de balles et de solutions pour le tuer, mais il ne veux pas risquer de toucher Ibara. Le Desert Eagle est bien plus puissant et la créature lui fait l'offrande de montrer tout son visage.

Le fléau expire.
Le tir d'Hanzo part.

D’accord, la sorcière comprend un peu la situation maintenant. Voici donc l’invocation de Hanzo : Jack. Pas n’importe quel Jack. Cette dégaine, cet accent, et cette manière de parler, il s’agissait là d’un personnage très connu de l’histoire judiciaire de l'Angleterre, Jack la faucheuse, aussi appelée du coup Jack the Ripper. L’exorcisme est un monde étrange, qu’une personne puisse invoquer une figure historique n'est au final pas si surprenant, elle avait bien affronté quelqu’un capable d’invoquer des créatures de la mythologie grecque. Donc, Hanzo pouvait invoquer LE Jack the ripper… Ou peut-être juste le concept ? Bref, il lui faisait un résumé de la situation, y glissant un compliment à son sort qui la fit sourire et rougir, mais elle se reprit vite.

“Merci… De mon côté, le reste de la famille est morte. Il ne reste plus que nous, et cette chose.”

Elle grognait, passant sa main sur une égratignure qui l’avait touchée lorsque la prison improvisée de son dragon a sauté. Puisque c’était sa propre énergie occulte, les dégâts étaient minimes, mais il restait que cela avait fait couler un peu de sang. Qu’importe, son dragon venait à ses côtés, la multicolore nourrice était aux affûts, mais aucun signe du fléau. Plutôt, son partenaire semblait dire quelque chose, mais c’était trop bas pour qu’elle comprenne ce qu’il disait.

“Tu n’es pas mal toi-même, Jack. Un shikigami pleinement autonome ou presque, cela a ses avantages. Ton champ d’action doit-être supérieur à celui de mes dragons, puisqu’ils ne sont que semi-autonome, ils n’ont rien de plus que de l’interprétation d’ordre, pas vraiment de personnalité à proprement parler.”

Son compliment était donc aussi destiné à Hanzo, mais elle n’avait aucune idée de s’il l’entendait ou pas. Il se massait les tympans, et semblait avaler en répétition… Est-ce que c’est une manœuvre médicale pour calmer ses tympans ? Peut-être, Ibara n’y connaissait absolument rien, elle ne pouvait donc pas dire ce qu’il faisait, ou si cela fonctionnait. Par contre, elle entendait clairement le cri venant d’un autre monde qui secouait le couloir. Ça y est, le fléau s’est décidé à attaquer en voyant que le duo ne s’était pas lancé à sa poursuite comme des mongoles ?

Elle fronçait les sourcils, ce n’est pas normal, il avait encore grandi. Il évoluait à vue d'œil, et laissait derrière lui un liquide si boueux qu’on aurait dit un placenta. C’était dégueulasse, tout simplement, Ibara considérait même pendant un moment à le placer au-dessus des poissauterelles, mais pour l’heure, non, il n’est pas plus répugnant qu’eux, mais c’est un très bon numéro deux oh que oui ! Tiens, sans aucun rapport, il semblerait que son partenaire soit de nouveau capable d’écouter, et de donner des directives par la même occasion. Se couvrir ? Ça, elle savait le faire, la défense, c’est son dada.

“Forêt imperméable, ronce inextricable, gardienne du rare et du malicieux, barrière du précieux…”

Une incantation, quelque chose qu’Ibara ne faisait jamais d’habitude, mais qui permit de dresser autour d’elle une barrière, c’était la première fois qu’elle utilise un sort occulte n’étant pas son sort inné, et qu’elle le consolide avec une incantation. Elle était à l’abri maintenant, du moment que rien n'éclate sa barrière, et même là, elle avait encore sa nourrice en dehors de cette dernière pour l’en empêcher. Elle laissait champ libre à son partenaire d’en finir avec cette atrocité.

Problème, les affreux avaient toujours plus d’un tour dans leur manche, et celui-là était particulièrement moche. Autant le duo Jack et Hanzo était très efficace, Hanzo avait mis le pied sur un piège. Cette fichue poisse, que le fléau laissait traîner derrière lui, était le piège. Gluante, elle devait empêcher Hanzo de s’en dégager, et s’il ne faisait rien, il allait manger une attaque sonore à pleine puissance. Mais même face à l’attaque, il ne manquait pas de cran, à tirer pour chercher à le blesser en même temps, la sorcière pouvait respecter cette mentalité.

Le fléau expire.
Le tir d’Hanzo part.
Puis un cri strident résonne, faisant trembler la barrière de la sorcière.

Mais est-ce que l’exorciste le subit de plein fouet ? Non, car devant lui, il n’y avait plus que de la verdure rouge. Des ronces et des pétales à perte de vue, un véritable mur qui ne laissait que le canon de son fusil à l’extérieur, et qui avait absorbé le gros de l’attaque sans voler en fumée. Ce mur, c’était un shikigami, Gardien, qui est apparu sur les ordres de son invocatrice pour protéger le médecin de la peste, pendant que sa maîtresse était à l’abri dans sa barrière.

“J’incante, alors écoute moi. Regarde le sol et les murs.”

Une voix rauque et profonde, la voix du dragon en face de lui, mais les mots de la sorcière qui continuait de renforcer sa barrière. Le dragon disparu, prenant trop de place, mais cela montrait à Hanzo ce qu’il disait. Le sol, les murs, le plafond étaient recouverts de ronces sans épines, et connectés à ces ronces, la nourrice qui restait prêt de sa maîtresse. Avec ces ronces, le fléau avait du mal à se déplacer, surtout qu’elles réagissent à sa présence et cherchaient à l’attraper. Pas seulement, le liquide qu’il secrétaire ne pouvait plus servir de piège, glissant des ronces et tombant sur le plancher.

Le message est très clair. Fonce, je m'occupe de la défense. Ibara ouvrit un tapis rouge au médecin de la peste et au tueur le plus craint d’Angleterre, c’était à eux de le prendre et de tuer cette chose. Si le lieu était plus dégagé, elle aurait fait participer son Gardien, mais le couloir étant trop étriqué, il ne pouvait apparaître que sporadiquement pour protéger l’exorciste, c’est tout. Sinon, il donnerait l’avantage au fléau, qui était assez petit pour se faufiler dans l’espace étroit que sa présence créerait.

“Il s’arrête lorsqu’il s’apprête à hurler, il faut que tu tiennes jusqu’à ce que l’on l’attrape dans nos ronces.”

Une autre voix, plus féminine, venant du dragon responsable du changement de décor. Le plan était donné, il fallait maintenant espérer le tuer avec, ou avant.

Le duo était simplement trop efficace pour un seul fléau. Ensemble, ils avaient la force de cinq personnes au minimum, avec deux s’occupant de la défense du groupe, deux de l’attaque et un stratège qui menait le tout. Il ne pourra jamais s’en sortir, s’il s’arrête pour crier, nourrice va l’attraper, s’il arrive à s’échapper et cherche à détruire la barrière d’Ibara, gardien va l’éclater en un instant, et s’il continue de fuir, le médecin de la peste et le tueur de whitechapel l’attraperont, parce qu’Ibara contrôlait le nouveau sol de sorte à mener le fléau vers ses assaillants, et vice-versa.

Bien à l’abri derrière sa barrière, pour que son partenaire n’ait aucune hésitation à décharger son uzi dans tous les sens, Ibara pouvait regarder son partenaire en action. Son style était bien, bien différent du sien. Il est plus impliqué dans le combat qu’elle, mais en même temps, elle a l’impression qu’il ne peut invoquer qu’un seul shikigami, c’est donc compréhensible qu’il ait besoin de participer aussi pour avoir un avantage sur son adversaire, ne serait-ce pas que numérique.

Ses armes par contre ne semblent pas adaptées à ce genre de méthode de combat. Son arme de poing, ok, mais son Uzi par contre, et bien, vous voyez bien qu’Ibara a besoin de se protéger pour ne pas le gêner, non ? Alors imaginez quelqu’un qui ne peut pas se défendre comme elle, ou qui n’est pas un invocateur. Il va se faire cribler de balles par son propre allié, ce n’est pas une fin glorieuse. Peut-être que Jack est immunisé aux armes à feu, il a l’air de les éviter à la perfection en tout cas, l’habitude ?

En-tout-cas, ils étaient efficaces, et… Jack prenait un peu trop de plaisir dans son métier quand même. C’est vraiment déroutant de voir quelqu’un dériver tant de joie d’un tel acte, enfin, elle ne va pas juger un shikigami, même si à ce stade, on pourrait parler de fléau domestiqué. Son ciseau géant et ses griffes le perforent des deux côtés. Entre ça, et les balles de Hanzo, il ne fera pas long feu.

Mais au lieu de mourir, il se mit à gonfler exponentiellement. De fœtus, il s’était transformé en bébé ? Mais avant même qu’elle puisse comprendre ce qu’il venait de se passer, plus rien. C’était comme si elle se réveillait soudainement d’un rêve hyperréaliste, le décor autour d’elle avait changé du tout au tout.

Elle n’était plus dans un couloir miteux, mais dans un jardin, pas n’importe quel jardin, le sien, elle le sait au fond d’elle. C’est le jardin qui lui a été volé par ce salopard de Daisuke ! Mais qu’est-ce qu’elle fait là ? Une téléportation ? Où est passé Hanzo ? Ses yeux s’adaptant de nouveau à la nouvelle luminosité des lieux, elle voyait un homme non loin de là, s’occupant de roses bleues, peut-être Hanzo au final. Elle s'approchait de lui et… Ce n’était pas Hanzo.

Ce n’était pas un inconnu non plus.

“Mh ? Un problème, Ibara ?”

Oui, un immense problème, elle se mettait à voir des morts. Devant elle se trouvait un homme typiquement japonais, un chef d’entreprise qui n’a pas eu besoin un seul jour de sa vie de s’inquiéter d’autre chose que du profit. Il n’est pas bien grand, mais avait un air d’homme d’affaires aguerri, surtout avec sa barbe et ses rides, et pour une fois, il n’était pas en costume. Il ne devait pas être là, mais…

“Rien, je hum, j'avais la tête ailleurs, c’est tout.”

Elle savait que quelque chose clochait, mais elle n’avait pas envie d’y penser. Elle vint s'asseoir à côté de lui, à son invitation, bien sûr. Le voir s’occuper de roses était quelque chose qu’elle n’a jamais cru vouloir voir dans sa vie, mais apparemment… Si.

“Et à quoi tu pensais alors, tête en l’air ?”

“Un rêve que j’ai eu.”

“Un bon rêve ?”

“Pas vraiment. J’étais en train d’affronter un marmot maléfique, avec un docteur de la peste et Jack l’éventreur.”

Il levait un sourcil, inquiet, et cela fit rire la sorcière avant de balayer ses inquiétudes avec un simple “C'est une blague”. La jeune femme posait simplement sa tête contre sa joue, clairement, elle profitait du moment. Maintenant qu’elle y pensait, ce fléau était vraiment l’un des plus cruels qu’elle n’a jamais eu le déplaisir d’affronter, n’est-ce pas ? Qui refuserait de passer du temps avec un être cher qui a passé l’arme à gauche, enfin, dans ce cas, qui s’est fait tué.

Est-ce qu'Ibara aimait son père plus qu’elle ne le pensait ? Nan, ce n’était pas de l’amour. Elle avait un désir, c’était différent. Pas pour son père, mais pour son amour. Elle n’en a jamais reçu après tout, est-ce que c’était pour ça qu’il était là, est-ce que le fléau comptait la retenir avec la promesse de quelque chose qu’elle n’a pas et n’aura jamais ? Quelle vicieuse petite bête.

“Je dois y aller. Cela fait longtemps, mais ça a été un plaisir de te revoir.”

“Aller où ? Tu es chez toi.”

Elle pouffa, se relevant, en le regardant déjà plus. “Allons, ne rendons pas ça plus dur que ça ne l’est déjà.” Une main se posait sur l’épaule de la dragonnière. Pas celle de son paternel, mais celle d’une personne qui a aussi disparu, bien que cette fois, Ibara en était la cause. Sa mère lui faisait face, il semblerait que, voyant que le désir ne la retenait pas, le fléau cherche à l’incapacité par la peur. Cela ne servait à rien, la sorcière n’avait même pas besoin de l’en empêcher, ce n’était qu’une illusion, après tout.

"Tu es mal tombé, tu ne pourras pas me garder ici avec ce que je veux, je n'ai que faire de l'amour des morts"

Quelqu’un d’autre présent dans son jardin ? Non, celui-là ce n’était pas une illusion. Parce qu’ils n’avaient rien à faire dans son jardin, il s’agissait de Jack et d’un gamin… Est-ce que c’est Hanzo ? Un petit Hanzo ? Hanzo-Miniature ? Il est adorable, mais ça dénote tellement de son apparence une fois adulte, c’est un sacré gap moe. Cela la déconcentre tellement qu’elle en oubliait un instant où elle était, avant que cela ne lui revienne et qu’elle se sépare de ses parents illusoires pour le rejoindre. Il semblerait qu’ils ne cherchent plus à s’occuper d’elle, l’illusion était déjà brisée.

“Désolé désolé. Ils sont avec toi ceux-là ?”

Elle pointait son doigt vers la forêt, qui grouillait de… Jack ? Plein de Jack en fait. Elle assumait que c’était des Jack, puisqu’ils partageaient beaucoup de ressemblances, mais le mini-Hanzo ne semblait pas pouvoir les maîtriser. Son shikigami restait un homme, c’est vrai, cela ne laissait pas beaucoup de place à l’imagination. L’imagination était essentielle pour créer un sort, si tu ne pouvais pas concevoir un sort, comment pourrais-tu le maîtriser ?

Ibara claquait son talon sur le sol, la nourrice apparaissait, et tout aussi tout plantait ses ronces dans le sol. Elles sortent pile sous les deux illusions de ses parents, les faisant disparaître. Ibara ne regardait pas, néanmoins. Elle pouvait détruire des illusions de ses parents, mais elle n’avait pas le cœur à les revoir mourir une seconde fois. Plutôt, elle s’approchait de la version miniature d’hanzo, et de jack, jusqu’à ce qu’ils se touchent presque. La sorcière tirait Jack vers elle pour qu’il se rapproche, non pour un hug, mais parce que ce qu’elle allait faire pourrait les blesser par inadvertance.

“Ne bougez pas, je m'occupe de nos invités indésirables.”

Sans mantra, cette fois, elle leva la main pour dresser une barrière, gardant la nourrice dehors, lui laissant le champ libre avec les créatures se trouvant sur son chemin. Avec son shikigami, Ibara ravagea la forêt abritant ses ennemis. Un spectacle qui aurait probablement fait bouillir Kenshin, mais ce n’est pas son problème, ils étaient dans un rêve non ? Elle pouvait bien faire ce qu’elle voulait. Ce n’est également pas la première fois qu’elle déploie le pouvoir de son shikigami ainsi, elle l’a déjà fait contre les poissauterelles ou dans son petit kamikaze avec Daisuke Sato. Les apparences mignonnes de sa nourrice cachaient un véritable monstre, il ne fallait pas sous-estimer les invocations de Homura Ibara.

“J’assume qu’ils sont liés à ta partie de l’illusion, Hanzo ? Mh, je commence à comprendre. Cela ne doit pas être facile d’avoir un shikigami autonome avec ce genre de background.”

Donc, l’âge qu’il a, serait lorsque son sort a commencé à lui pourrir la vie ? Mmh, c’est bien particulier comme situation, il est vrai. Ibara n’avait pas ce genre de problème, plutôt, son sort n’avait pas de conscience, mais agissait instinctivement sur son inconscient, donc se manifestait dès qu’elle se sentait en danger, aka dès qu’on la touchait… Oh, pendant qu’elle réfléchissait, elle en avait fini avec l’armée de Jack… Aoutch, la forêt à l’air bien lugubre avec tous ces corps et ces ronces qui déracinent même des arbres. Elle baissait sa barrière, mais gardait son shikigami. Sait-on jamais.

“Je ne creuserais pas le sujet plus loin, désolé, mais ce genre de chose me saute au visage. As-tu une idée de comment sortir d’ici ? J’en ai bien une, mais cela risque de prendre du temps, beaucoup de temps.”

Elle soupirait, même si cela avait été une affaire de quelques instants, utiliser les ronces de sa nourrice de manière aussi destructrice drainait ses réserves occultes. Même invoquée, elle devait continuer de l’alimenter si elle voulait faire de tels tours de force, tout comme les faire se régénérer de leurs blessures lui demandait de l’énergie occulte. Même si cela n’avait aucune application en combat, tant c’était lent. Les fléaux peuvent se régénérer avec tellement de simplicité, mais pour les shikigamis n’étaient spécialisés dans ce genre de choses, il fallait bien croire que c’était une tout autre paire de manches pour les shikigamis. Parce qu’ils n’étaient pas composés d’autant d’énergie occulte que les fléaux ? Ou que le contrôle de cette dernière est géré par les invocateurs, et donc que leurs lacunes à l’utiliser se transmettent à leurs invocations ? En-tout-cas, si Hanzo ne comptait pas répondre alors qu’elle s’était perdue dans ses pensées, c’est qu’il n’avait pas d’idée, et qu’elle pouvait donner la sienne.

“Je me permets. Pourquoi tu penses que les illusions t’ont attaqué, mais pas moi, bien que j’ai refusé de rester aussi ? Parce que ce n’est pas l’envie le problème, c’est sortir de son fantasme qui l’est. Le fléau ne doit pas pouvoir complètement accéder à nos esprits, sinon on aurait aucun souvenir du vrai monde, mais il doit pouvoir voir nos désirs, et a choisi celui qu’il a jugé le plus à même de nous retenir. C’est un fléau venant de l’amour d’une mère pour son enfant mort-née, il doit penser que pour notre famille nous aurions fait une connerie similaire. Mais sais s’il s’agissait uniquement de famille, il aurait pu créer un monde impliquants l’ordre occulte, cela aurait été plus efficace non ? Ce n'est pas une histoire de famille de sang, il y avait mon père, et il n'a aucune lien de parenté réelle avec moi.”

Elle s'arrêta, parce qu’inconsciemment, sa main était partie pour caresser la tête du petit Hanzo. Oulala, c'est dangereux ça ! Elle ne connaissait pas son envie de ne pas être touché, mais elle n'avait pas envie de le mettre en pétard ! “S’il se met à penser que je l’infantilise, il va m’en vouloir, c’est sûr !” se dit-elle. Elle s'éclaircit la gorge avant de continuer.

“Sur le papier, rien ne l'empêche, sauf si on ne désire pas la même chose. Et puisque nous ne nous connaissions pas, il n’y a pas de souvenir possible où l’on serait tous les deux au même endroit à part pour le tuer. Je pense savoir qu’il ne peut pas “créer” quelque chose de neuf, nous n’avons vu que des souvenirs jusqu’ici, et s’il voulait me garder ici plus efficacement tout en ayant accès à mes souvenirs et mes désirs, il m’aurait créé un compagnon de vie. Or, il ne l'a pas fait. Est-ce que tu vois où je veux en venir ? ”

Cela ressemblait fortement à des délires d’une folle, sans le contexte. Mais tout allait s’éclaircir, croyez-moi !

“Donc, en résumé, il ne peut rien créer, je dirais même, il ne peut rien altérer, parce que je suis adulte, et pourtant, mes parents avaient la même apparence que lorsque j’étais petite. Puisque tu as pu venir jusqu’à moi, cet espace n’a pas une distance illimitée. Donc si nous allons dans une direction ensemble, au-delà de ce fantasme, il ne pourra pas en créer de nouveau, puisque nos fantasmes sont incompatibles, et il ne pourra pas non plus prolonger mon jardin, parce que je le connais par cœur, et qu’il a forcément une fin. Qu’est-ce qu’il se passera alors à ton avis ?”

La fin, tout simplement. Le film après la bobine, le livre une fois les pages finies. Autrement dit, rien. L’histoire s’arrêtera là, et l’illusion avec elle. Du moins, si elle ne se termine pas, elle sera à son plus faible, et il sera facile de détruire ce monde pour retourner dans le vrai.

“Il se peut que l’on soit dans une barrière, et que l’espace soit limité, ou que l’on soit dans nos propres esprits, et que mettre fin à l’illusion nous réveillera tout simplement. Mais je préfère penser que l’on est dans le premier cas, sinon, quel intérêt de te pourchasser avec des monstres ? Ils ne pourraient pas te blesser si tout n’était juste qu’une illusion, et j’en ai déjà affronté une comme ça. L’illusion aurait juste continué sans s’occuper de toi, tu n’aurais rien pu faire.”

Brrr, elle avait des frissons à repenser au sort là, en comparaison, cette illusion est bien amatrice. M’enfin, elle avait certains atouts, pour sûr. Par exemple, le fait qu’elle ne nécessitait pas de contact, et qu’elle pouvait blesser sa cible. Elle était en vérité, bien particulière, puisqu’elle fonctionnait aussi bien sur les invocateurs que les invocations.

“Dans les deux cas, en route ! C’est pour ça que je dis que ce sera long. Je ne sais pas combien de temps, on devra marcher, alors autant nous y mettre maintenant.”

Trop nombreux et dérangés, voilà une bien étrange manière de parler de son sort inné, si bien qu'Ibara se demandait si la raison de leur différence d'âge et de comportement actuel n’était pas liée à sa théorie. Peut-être que Hanzo désirait retourner à un âge où son sort inné ne s’était pas manifesté, et donc en bas âge. Son regard cramoisi dérivait donc vers Jack, qui la couvrait d’éloge. Une démonstration de puissance, comme il le dit, mais qui la laissait insatisfaite. Elle n’aurait pas dû se précipiter ainsi, elle aurait dû étudier un peu plus ces faux-jacks.

“Est-ce que cet endroit influence également ton esprit ? Non, tu dois parler de ces Jacks, et donc de celui-là aussi.”

L’indépendance de ses invocations semblait donc être bien plus un problème qu’elle ne l’avait originalement pensé. Cela expliquait l’aura étrange qu’avait Hanzo adulte, vivre avec une autre personne dans sa tête, voir plusieurs, cela ne devait pas être recommandé. Ce n’était probablement pas la seule chose qui préoccupait son esprit, elle avait bien remarqué le mouvement de recul qu’il avait eu à son approche. Beaucoup de choses à creuser, mais qu’elle préférait laisser enterrer. Certaines blessures n’avaient pas à être rouvertes pour une simple curiosité malsaine.

“Merci Jack, je doute que cela fonctionne sur quelqu’un d’aussi agile que vous deux, et pour l’énergie que cela me demande, ce n’est pas rentable.”

Pour des personnes comme Hanzo et son invocation, les sorts grandiloquents ne servaient pas à grand chose. Elle n’aimait pas réfléchir plus que nécessaire à comment vaincre ses collègues, mais la sorcière a bien vite appris que renier cette nature lui faisait plus de mal que de bien. Ce n’était que de la théorie, aucun mal à ce qu’elle théorise comment un affrontement amical se déroulerait, non ? De toute manière, les adversaires qui avaient une agilité bien trop grande pour être des proies faciles, Ibara en a affronté quelques-uns, et n’avait pas encore une parade totale contre eux. Du moins, elle ne l’avait pas encore essayée. Au final, il fallait simplement battre la vitesse avec la vitesse, l’agilité avec l’agilité, et une bonne stratégie.

“Ne parlons pas de malheur, je veux passer le reste de mes jours à la campagne, entouré de mes âmes-sœurs, pas en train de marcher en espérant voir le bout !”

Il semblait retourné en enfance, et cette expression tellement pure faisait très étrange une fois associée à Hanzo. L’image de l’homme stoïque en apparence du médecin de la peste qu’il avait à leur rencontre commençait lentement à tomber en morceaux. Si jamais il venait de ne pas se souvenir de ce qu’il se passe dans cet étrange rêve, la sorcière omettre ce détail. Par compassion plus que par intérêt, elle n’aimerait pas qu’on lui rappelle comment elle était physiquement avant d’avoir rejoint l’ordre occulte, elle assumait que mentalement, c’était pareil pour lui, puisqu’il y avait une si grande différence. Même s’il était adorable ainsi.

“Dire qu’un si brillant bambin a grandi en un bien sombre adulte…”

Elle avait parlé bien bas, pour une fois, mais n’insistait pas plus dessus. Elle savait que les exorcistes tiraient toujours le bâton le plus petit, c’est pourquoi elle était membre de l’ordre occulte après tout. C’est un peu le regroupement des malchanceux. Assez de lamentations, le petit hanzo avait une idée, et était semble-t’il très intéressé pour monter un des dragons de la sorcière. Pas qu’elle n’y avait pas pensé, mais…

“Je pensais que tu n’aimais pas être touché ? Cela ne compte pas pour les shikigamis ? Du moment que ça te va, oui, on peut. Laisse-moi un moment.”

Elle n’allait pas utiliser son gardien pour ça, ou son serviteur. Elle avait besoin de quelque chose de plus rapide. La sorcière rouge joignait donc les mains, et fermait les yeux. Comment les dragons étaient-ils créés ? Elle n’a pas toujours eu trois dragons, elle n’en avait qu'un lorsqu’elle était enfant, la nourrice, en grandissant, le gardien est apparu de lui-même, et en s’entraînant, les serviteurs sont venus au monde. N’étant pas un sort hérité, Ibara n’avait que très peu d'informations sur son propre sort, mais elle en savait une chose : il est incomplet. Un sentiment qui lui saute au visage lorsqu’elle réfléchit à son sort, comme un athlète sachant qu’il pouvait courir plus vite, ou un peintre s’approchant petit à petit du chef-d’œuvre.

Ibara le ressentait, cette sensation si particulière, comme si elle frappait un mur avec une pioche, et qu’un énorme morceau allait s’en séparer, la rapprochant un peu plus de ce qui se trouvait de l’autre côté. Lorsqu’elle rouvrit les yeux, elle savait qui elle devait appeler, quel dragon allait répondre au nom qui résonnait dans son esprit si fort qu’elle en peinait à penser. Une spirale de pétale s’élève depuis ses pieds, et elle appelle son quatrième dragon.

“Cocher.”

Deux pattes tapèrent le sol, dispersant d’un coup sec les pétales, et montrant un nouveau dragon au monde. Quadrupède contrairement au gardien et à la nourrice, mais suffisamment grand pour pouvoir porter sur son dos tout ce bon monde. Le cocher, comme vient de l'appeler Ibara, respirait la vitesse, si c’était lui, ils allaient pouvoir quitter cette illusion sans soucis.

“Accrochez-vous bien, je ne sais pas à quel point il est rapide.”

L’invocatrice était devant, évidemment, et tapotait le cou de son invocation pour qu’il tourne la tête vers elle. Il était majestueux, Ibara avait bien du mal à comprendre l’enfer que vivait Hanzo avec son sort inné, chacun de ses dragons la remplissait de bonheur, et en avoir un nouveau lui donnait envie de pleurer. Mais elle se retenait, ils avaient une mission à remplir.

“ Cocher, sort nous de là.”

Le nouveau dragon hochait la tête, et déployait des ailes qu’il avait proche de ses pattes arrières, est-ce qu’il pouvait voler ? Placé comme elles étaient, même son invocatrice en doutait, mais plutôt que de voler, il se mit à courir, à galoper même. Il ne semblait que s’étirer avec ses ailes, apparemment… Non, ce n’est pas ça, une fois avec assez d’élan, il se mit à sauter, à bondir, que dire, à décoller avec bien plus de panache que son précédent galop ! Ne vous trompez pas, sa course était déjà plus rapide que le vol de ses autres dragons, mais avec ses ailes déployées, il semblait fondre le ciel à la vitesse d’une balle de gros calibre ! Ce n’était probablement qu’une impression en tant que passagère, mais c’est comme ça que le vivait Ibara. Le paysage défilait si vite qu’elle avait du mal à le distinguer, si bien qu’à un moment, il semblait entièrement fait de banc, jusqu’à ce que…

“Ouiiii, ouiiin, ouiiiin !”

Plus. Jamais. Pas de chevaucher son cocher, nan ça, c’était génial, mais plus jamais elle forçait une barrière comme ça, cela donne mal au crâne ! Tiens, est ce que son nouveau dragon avait eu l’air triste lorsqu’elle a pensé ses premiers mots ? Probablement son imagination. Ce qui n’en faisait pas partie néanmoins, c’étaient les cris d’enfant qu’elle entendait, et la salle dans laquelle ils se trouvaient tous.

Une pièce sans queue ni tête, où les murs semblaient recouverts de veines écarlates, et des piliers de pierres noires entouraient un nouveau-né gigantesque dans une triste réplique d’un lit pour enfant. Ibara… Couina, tout simplement. De dégoût, de surprise, de peur peut-être ? De tout ça, cette vision d’horreur restera à jamais gravée dans son esprit, le fléau ayant enfin détrôné les poissauterelles dans son classement des choses les plus affreuses qu’elle n’ai jamais vu en personne, mettant donc le caractère de Kenshin à la troisième place.

Comment ça, c’est mesquin ?

“Ne regarde pas ça Hanzo c’est dégoûtant !”

Elle se retournait en vitesse pour cacher les yeux de son camarade rajeuni, plaçant ses mains devant sa vision, mais sans le toucher pour autant, gardant une bonne paire de centimètres de distance… Mais ce ne sont pas ses yeux qu’elle cachait au final. Pourquoi est-ce qu’elle cachait ses pecs ? Oh, il a vieilli à nouveau, bah oui normal, nous ne sommes plus dans l’illusion, dah. Comment a-t-elle pu oublier ça ?

“Oh, bon retour parmi les adultes, tu peux à nouveau boire jusqu’à désintégrer tes reins pour oublier cette mission… Ce que je vais probablement faire une fois qu'on aura fini.”

Il n'entends pas la remarque d'Ibara, tant les mots sont murmurés, mais si ça avait été le cas, ça n'aurait pas été pour bien le prendre. La mentalité de deux époques se mélange dans sa tête, et la réplique d'Ibara n'est pas franchement du goût de l'Hanzo du présent. En revanche, il revient un peu en arrière après avoir formulé son idée, et secoue la main pour balayer l'affirmation de la sorcière.

"Si c'est une monture, qui plus est un sort inné, ça me convient. Tes dragons sont majestueux, et propre de ce que j'ai pu en voir. Et je n'aime surtout pas qu'on me touche a même la peau. Enfin, j'aime pas trop sur le blouson non plus. De toute façon, les gens devraient savoir garder leurs mains. C'est rustre, que d'avoir à toucher l'autre pour l'interpeler ou je ne sais quoi."

Un mudra est effectué, et soudain, un nouveau dragon s'implanta dans ce monde onirique. Le regard s'illumine, le sourire prend une forme carnassière, et le petit Hanzo est aux anges. Plus il reste ici, plus il a l'impression de retourner vraiment en enfance. Et il le sait, intérieurement : il va être tellement aigri de partir, le flot de nostalgie va le prendre d'un coup d'un seul, comme lorsqu'on passe le meilleur week-end de sa vie et qu'on est forcés de rentrer chez soi, mais qu'on voudrait tellement revivre les soirées encore et encore et que la sensation de bonheur d'être avec ceux qu'on aime n'en finisse plus. Mais pour le moment ... Il profite de sa condition. Il s'endort quelque peu sur ses lauriers. Il fait confiance à la dresseuse.

"Qu'il trace sa race. Moi et Jack, on a pas peur."

"Nullement, monsieur. J'avoue ne point avoir l'habitude de ce genre de déplacement. L'inédit ne mène pas toujours à de bonnes surprises, mais si telle est la volonté de tous, je me plierai à l'inconnu."

Et le dragon s'envola, a une vitesse vertigineuse. Au début ce fut formidable, et il rit à gorge déployée. S'il tente de lever la main en l'air, maintenu par un Jack qui se veux insistant quant à sa sécurité, il remet de lui même bien vite ses mains de manière à tenir fermement le Shikigami. C'est pire que toutes les attractions qu'il a pu faire dans sa vie. C'est le plus grand manège qu'il a pu expérimenter. C'est une force de la nature, un reptile bien trop énorme pour aller aussi vite. Son coeur tambourine dans sa poitrine, assez rapidement pour s'en inquiéter, assez lentement pour qu'il puisse en compter chaque battement. La sensation que l'écoulement du temps n'est plus le même, parce que le décalage entre les mouvements du coeur et l'espace traversé par le dragon semble anormal. Et puis soudain, la barrière mentionnée par Ibara éclate en morceau.

Il n'a jamais pris de portail, de trou noir ou de tunnel spatio-temporel. Il ne sait même pas si ça existe. Mais traverser ce genre de barrière qui enferme l'adversaire dans une bulle de réalité fait assurément le même effet. Brutalement, sans aucune forme de cérémonie, les membres d'Hanzo s'étirent, sa bouche se déforme pour y accueillir son masque, il a soudain plus chaud alors que son manteau habituel prend forme, sa gorge se serre à son développement alors que la cravate se referme. Il revient dans la réalité, et il a mal à la tête. Il a l'impression de perdre l'esprit, d'être perdu dans un conte de Lovecraft, et lorsqu'il rouvre les yeux, l'impression d'être mort ou dans un monde qui ne peut être décrit se confirme. Et son crâne le martèle, maux de têtes auxquels viennent s'ajouter les hurlements désespérés du gosse ... Géant ? Des piliers entourent le môme, les murs semblent être l'intérieur du bide d'une femme enceinte ou ce genre de chose ... C'est putain de dégueulasse.

Et Ibara ne manque pas de lui faire remarquer. N'ayant plus la mentalité joviale qu'il arborait enfant, il la regarde en haussant les sourcils devant l'infantilisation manifeste, mais elle se récupère en comprenant qu'il n'est plus le même qu'il fut quelques minutes auparavant, aussi se radoucit il quelque peu ... Et se montre manifestement gêné, finalement, d'avoir eu a montrer une facette aussi personnelle de lui. Il se gratte la tempe, et la regarde avec insistance. Il n'a aucune envie qu'elle l'infantilise tout le temps, maintenant. Il essaye de virer ce sentiment bizarre, il lui répond pour chasser toute cette impression.

"On sera deux. C'est immonde, et j'ai aucune envie de me faire toucher par cette merde. Je vais faire diversion. Désolé, Jack, mais ce truc nous dépasse."

Il veut finir ça vite, et bien. Il n'a aucune envie non seulement de crever, mais que du liquide aussi dégoûtant dans lequel il a marché précédemment ne lui tombe dessus depuis le plafond, depuis le corps du gosse qui risque de l'écraser incessamment sous peu, ou autre chose. Vu la taille du machin, il a l'impression que le sol n'a pas de fond. Il ne distingue même pas les petites pattes du bambin. Il imagine que la mort du fléau mettra fin à toute cette mascarade. Jack, de son côté, hoche simplement la tête, conscient qu'il n'est qu'un pion, et que de toute façon, c'est possiblement dans sa nature d'être ce qu'il va devenir ici.

"Et par les enfers, la bête se lèvera."

Il a conscience que le bébé ne l'écoute pas. Mais c'est l'une des constantes du sort, d'établir ce qui doit être, pour révéler la pleine nature du meurtrier de Whitechapel. Alors, couvert par les cris, il fait fi du brouhaha pour déblatérer son discours, seulement audible par sa camarade.

"Jack l'éventreur a certes pu être un docteur cherchant à empêcher un scandale pouvant mettre à mal la couronne, mais certains avancent que les meurtres inhumains produits n'ont pas pu être accomplies de la main de l'homme. "From Hell", voilà les derniers mots de la lettre qu'il a adressé à la police pour revendiquer les crimes, ce qui laisse supposer qu'il vient vraiment de l'enfer, qu'il soit suppôt de Satan ou le diable lui même. Aujourd'hui ... C'est exactement ce qu'il est."

Jack se jette alors dans le vide ... Et un cri semblant sortir des tréfonds du Tartare sort de sa bouche. De son ventre, des ongles, des doigts le transpercent, puis ses mains séparent son torse en deux, pour s'extirper de là. Gagnant en épaisseur, le rejeton des enfers fait jaillir de son dos des ailes, de son crâne des cornes, et son corps prend une apparence squelettique, son aura un charisme infernal, son visage apporte une vision démoniaque. Jack l'éventreur est un démon, et il entend bien de faire de cette bulle de réalité son royaume en y imposant sa domination.

D'un cri guttural et lugubre, il fonce à une vitesse hallucinante sur l'adversaire, et même si ainsi il est d'une taille impressionnante, il semble être une mouche comparé à ce qui est sur son chemin. Pourtant, sa petitesse est une force, puisqu'il transperce sans mal l'oeil du bébé, qui hurle de douleur à l'entrée du démon dans son corps. Un hurlement qui fait trembler les fondations de l'illusion, et alors que le démon qui a terrifié Londres transperce le machin de part en part, Ibara semble avoir le champ libre pour l'entraver et peut-être même l'abattre.

Jack démon:

Adorable, avoir honte de quelque chose n’étant pas de sa faute. Ibara ne comprenait vraiment pas l’ego, en étant une de ses plus grandes victimes, mais ne pouvait s’empêcher de se sentir un peu spéciale en ce moment. Elle avait probablement vu une facette de Hanzo que très peu de gens encore en vie pouvaient se targuer de connaître. Néanmoins, la sorcière n’était pas assez folle pour le lui dire à voix haute, plutôt, en voyant son regard s’adoucir, le sien fit de même, et un léger sourire lui prit les lèvres. Perceptive, elle mimique le geste d’une fermeture éclair sur sa bouche, non sans ricaner un peu intérieurement, avant de reprendre son sérieux. Assez de distraction, il y a un monstre à abattre.

Néanmoins, elle allait le prendre sur son offre de boire un coup, voir plusieurs, ensembles. Elle n’avait qu’une envie, se rincer le bec avec de l'alcool si pur qu’on pourrait désinfecter une plaie en l'en aspergeant. C’est le genre de chose qu’elle aimerait ne plus jamais avoir à voir pour le restant de ses jours, mais malheureusement, elle allait devoir faire quelque chose pour le tuer…

“Je ne veux pas, je ne veux pas, je ne veux pas, je ne veux paaaaaaaaahahahas !”

Après le médecin de la peste, c’était à Ibara de montrer un côté plus enfantin de sa personnalité, sauf qu’elle n’avait pas l’excuse d’être réduite à l’enfance, ou à la honte qu’avait affiché l’exorciste un peu plus tôt. Elle ne faisait que dire tout haut ce que tous les gens conscients présents ressentaient. Personne n’avait envie de tremper ses mains dans ce cambouis.

Son cocher les déposa tous les deux sur une plateforme, et aussitôt, Ibara leva une barrière pour protéger les deux invocateurs, comment ça Hanzo voulait faire diversion, non non non, interdit ! Personne ne bouge d’ici et on laisse les shikigamis faire ! Cette pièce était déjà particulièrement écœurante, Ibara n’allait pas courir après Hanzo pour le protéger.

“Reste là, avec ton jack et mes dragons, on n’a pas besoin de se mettre en danger.”

Même si ce “Jack” n’avait rien à voir avec le précédent, quoique puisqu'il était sorti de son estomac, c’était peut-être le même ? En-tout-cas, comme l’avait annoncé Hanzo dans son incantation, ce shikigami là était un démon, et il semblait bien plus puissant que le shikigami qu’il a ouvert en deux pour sortir. Un sort étendu peut-être ? Il est bien particulier alors, comparé au sort étendu d'Ibara, mais il prouve que Hanzo veut en finir au plus vite.

Dans ce cas, s’il s’y mettait sérieusement, Ibara ne pouvait pas continuer d’y aller à moitié. Elle aussi, allait utiliser son sort étendu. D’un claquement de son talon sur le sol, un autre dragon apparaissait, celui-là, Hanzo l’avait déjà vu, c’est le gardien, accompagnant le cocher un moment, avant de voir la couleur de ses pétales et sa taille changer. D’uniquement rouge et noir, elles virent leur couleur passer par une multitude de différentes pigmentations, avec du bleu, du blanc, du rose et du cramoisi. Ibara avait utilisé la greffe pour donner la force physique de ses quatre serviteurs à une seule invocation, le gardien.

Avec l’assistance du Démon Jack, les deux dragons allaient pouvoir en finir rapidement avec ce bébé géant… Théoriquement. Parce que ce qu’il s’est passé n’était pas aussi simple. Des deux attaques qu’avait lancer les dragons d’Ibara, seulement son cocher avait réussi à faire mouche grâce à sa vitesse, son gardien n’ayant pas été aussi chanceux. Même Ibara avait du mal à comprendre ce qu’il s’était passé, ils volaient tous les deux vers le bébé, mais là où son cocher avait réussi à lui crever le deuxième œil, son gardien avait rencontré une sorte de mur ?

“Ce n'est pas bon ça. Je n’arrive pas à comprendre ce qu’il vient de se passer.”

Ce n’était pas une sorte de mur, c’était littéralement un mur qui avait accueilli le dragon, surgissant de nulle part, flottant comme par télékinésie, et ayant disparu quelques secondes après. Le fléau pouvait faire apparaître des objets comme ça ? C’est bien leur veine, mais c’était pire que ça. Grâce à ses énormes réserves d’énergie occulte, il régénéra ses yeux crevés, et hurla à plein poumon. Ce fichu hurlement, Ibara et Hanzo le connaissaient bien, mais celui-là était encore différent.

Ibara n’arrivait pas à comprendre ce qu’il se passait, elle voyait le bébé géant sur le sol, et eux aussi maintenant étaient sur le sol, mais ce n’était pas le cas avant, ils avaient été déposés sur une plateforme assez haute dans les airs quand même, et maintenant ils étaient sur du sol, pas du parquet ou du béton, du sol, de la terre. Puis, l’enfant maudit était si loin maintenant, bien plus loin qu’étaient les invocations du duo.

“Où sommes-nous ? Encore son pouvoir à la con ?”

Dans le doute, elle vérifia, non, Hanzo n’était pas redevenu un enfant. Dommage. Mais ils avaient plus urgent à considérer, comme l’armée qui fonçait sur eux ? Pas une armée moderne, mais plutôt des cavaleries à cheval avec des mousquets. Un bon dans le temps ? Ce fléau a jugé que pour les vaincre, il allait avoir besoin d’une guerre entière ?! Le talon de la sorcière claqua à nouveau, et son gardien se téléporta devant elle. Elle fait un geste de la tête à son partenaire pour qu’il monte.

“Hors de question que je participe à son petit jeu, une seconde fois, on va aller le démontrer directement. S’il est présent dans l’illusion, ça veut dire qu’on peut le tuer ici.”

Et d’un puissant coup d’aile, le dragon s’envola, faisant fi des salves tirées en sa direction, même si Ibara notait qu’ils n’étaient pas de “vraies” personnes, puisqu’ils pouvaient réagir à son dragon alors qu’ils avaient l’air d’Européen, il n’y avait pas tant d’exorcistes chez les non-japonais.

Aaaah… Des avions maintenant ? Ibara commençait un peu à s’inquiéter, c’était quoi la prochaine étape, lancer une nuke ? Si le bébé pouvait le faire, c’était fini pour les deux exorcistes. Mais, partons du principe qu’il ne pouvait pas le faire. Sinon, quel est l'intérêt de se battre comme des chiffonniers pour rien ? Il pourrait tout simplement les détruire d’un coup d’un seul… Ou peut-être peut-il le faire, mais il serait pris dans le souffle de l’explosion ? Bah, cela n’a pas d’importance.

“Accroche-toi bien, il est hors de question que l’on me dépasse dans les airs !”

Des avions à hélice ? Pff, Ibara allait en faire un cimetière de leurs carcasses ! Son gardien greffé percuta un de ces monstres de métal de plein fouet avec son aile, et déchirait son carcan comme dans du beurre. Huh, non ce n'est pas normal ça. La greffe était forte, mais pas si forte qu’elle pouvait déchirer du métal, elle pensait démolir l’hélice, pas toute la structure… Ah, non, c’était logique en fait. Ce n’était pas des avions, ou des cavaliers, qui leur fonçaient dessus. C’étaient des créations d’énergie occulte, pas des inventions de l’homme fait de métal ou des créatures de chair.

Elle esquissait donc un sourire carnassier, ses inquiétudes s’en allaient. Dégageons le ciel pour permettre à son compagnon de tirer. Son cavalier, gardien, perdit en masse corporelle, reprenant ses couleurs d’origines, mais à défaut, c’était le cocher qui voyait son apparence changer, ses pétales restèrent inchangées, mais son corps prenait une couleur plus violette, et des ronces poussaient de lui. Ibara avait greffé la nourrice à son cocher, et ce dernier se servit de ses nouveaux pouvoirs pour créer une extension de ses ailes, les prolongeant avec des ronces avant de filer à pleine vitesse.

Un éclair rouge et violet traversait le ciel, et les avions tombaient sur son passage, pire que ça, il semblait bondir d’une de ses victimes à l’autre, ne laissant de son tremplin que des débris fumants, chutant vers leur inévitable fin. C’était tout simplement magnifique. Le pouvoir destructeur des dragons d’Ibara n'inspirait en elle que cette sensation, comme un homme plongeant son regard pour la première fois sur la perfection de la chapelle sixtine, ou découvrant les lumières hypnotiques des aurores boréales. Son dragon était dénué de la violence et du vice du démon qui l'assiste dans son œuvre, c’est probablement là la différence entre regarder un loup chasser un lapin, et une lionne poursuivre une gazelle. Le résultat était la mort des deux proies, mais le loup n’avait pas la grâce de la reine.

La détonation d’une arme à feu la ramène néanmoins à la situation. C’est vrai, ils avaient un bébé géant à détruire. Ibara jalousait - ou admirait, pareil au même - l'implication de son collègue invocateur dans le combat. Elle-même n’avait pas le physique ou les capacités nécessaire pour faire de même, elle était une invocatrice de A à Z, et elle commençait à se demander si c’était une si bonne manière de se battre. Ce n’était pas le moment pour ce genre d’interrogation, au pire, elle pourra lui demander des conseils plus tard.

C’est l’heure d’un infanticide.

Et pour faire ce travail, qui de mieux que le démon Jack the ripper ? Ce démon n’avait pas de pitié, pendant qu’Ibara s’assurait de la défense, ce monstre avait réussi à frapper plus d’une fois ce salopard malgré sa barrière, très honnêtement, la sorcière n’aimerait pas affronter ce shikigami seul, mais avec en plus son invocateur et ses balles, nan, c’est mort, Dieu merci, ils sont dans le même camp.

Le cocher reçut un ordre, et plongea au sol, n’ayant que faire de la cavalerie, ne prenant même pas la peine de se défendre ou d’attaquer, il concentrait tous ses efforts sur quelque chose d’autre. Les ronces qui prolongeaient ses ailes se rétractèrent, son corps repris sa couleur originelle, mais ses pétales prirent le même éclat qu’avait le gardien précédemment. Ibara avait changé de greffe, cette fois, elle lui avait donné la puissance de ses serviteurs, et le résultat promettait quelque chose de grand.

Taille, muscle, posture, il avait tout pour commencer son sprint, puis son vol avec une seule destination : le fléau. Il n’allait pas pouvoir l’éviter celle-là, pas avec Jack le maintenant en place et l’éventrant sur place, mais il allait pouvoir arrêter bien vite. Avec ton son élan, comparable à son vol de plus tôt, le Cocher greffé décolla, et Ibara le perdit de vue.

Elle savait où il était, mais ses yeux n’avaient pas réussi à suivre l’accélération, et lorsqu’elle le vit de nouveau, il était à l’arrêt, suspendu dans les airs, laissant couler de son corps le sang putride du monstre qu’il a transpercé de part en part, et qui disparaissait à vu d’œil. Avec lui, cette “illusion” disparaissait aussi, si bien que le duo d’exorciste se retrouvait de nouveau dans le vrai monde, si ce n’est qu’ils étaient hors de la maison. Tant mieux, parce qu’avec ses dragons, Ibara et son collègue auraient fini écrasés contre un mur.

“Aah. Fini enfin !”

Le gardien se couchait sur le sol pour permettre aux deux invocateurs de descendre, avant de disparaître avec le cocher. Quelle mission de merde ! Est-ce que la sorcière avait une gueule à jouer à silent hill ?! Non ! Elle n’aime pas l’horreur ! C'est un chat peureux, les jumpscare et les histoires d’horreur ça l’empêchait de dormir le soir ! Maintenant, que la mission était finie, elle pouvait laisser tomber la façade sérieuse qu’elle avait, et si elle n’avait aucun amour-propre, elle pleurerait ici et maintenant !

“Je veux rentrer chez moi… Ah, c’est vrai, j’en ai plus… “

Cela devenait vraiment dur de ne pas pleurer… Ah mais elle n’était pas seule ! Elle secouait la tête pour se reprendre, avant de regarder Hanzo, il allait bien ? Dès le début du combat, il avait pris un sacré coup aux tympans, et c’est lui qui a été le plus affecté par l’illusion, si quelqu’un devait s’assurer que son collègue aille bien, c’est elle !

“Est-ce qu-que ça va ?”

… Ah, sa voix a craqué lorsqu’elle a revu le démon Jack… Je vous l’ai dit, elle ne fait vraiment pas dans l’horreur ! Pendant un combat, ça va, elle peut gérer, mais en dehors… Impossible ! Impossible impossible impossible ! Elle ne reste qu’une pauvre et fragile femme en détresse ! Du moins, elle aimerait l’être, c’est beaucoup moins de soucis, et elle serait sûre d’avoir un prince charmant venant à sa rescousse à la fin.

“Désolé, je… N’aime pas l’horreur et tout ça. Je crois que mes jambes vont me lâcher…”