Qu'ils étaient chiants, les fléaux bien trop faibles pour se permettre d'affronter en tête à tête leurs adversaires. Une telle horde de créatures occultes avait de quoi faire mal à la tête : l'énergie négative à l'origine de cette cohorte de véritables démons asiatiques rendant l'air difficilement respirable pour n'importe qui n'étant pas habitué à la chose. Même dans le cas de Toshiyuki, dont les journées étaient remplies de missions variées quand il n'avait pas le droit de se reposer tranquillement, le tout en était presque difficilement respirable. Heureusement qu'il se sentait "dans le mood" comme diraient les jeunes, qu'il se sentait bien dans l'ambiance, sur le moment. Ce genre d'instant où vous êtes tellement plongés dans l'action que vous en perdez la notion du temps et de l'espace. En même temps, un bon combat à 2 vs 100 aux côtés d'un compagnon d'arme comme une dernière bataille dans un film de guerre, ça avait le chic pour booster l'envie.

La créature, acculée mais très certainement rassurée par l'arrivée massive de ses nombreux (mais faibles) adeptes, fut à deux doigts de tenter une manœuvre. Attaque ? Fuite ? Nul ne le sait, vu que le faucheur répondit du tac au tac, plongeant subitement son arme dans la tête de la créature, enfonçant la lame aiguisée comme un rasoir dans ce qui semblait être sa bouche, s'il en avait une. Un crissement semblant tout droit sortir d'un vieux puit, comme si on y faisait tomber une lourde pierre ricochant contre les parois usées par le temps, vint marquer la douleur provoqué par l'assaut, plantant alors le fléau pour l'empêcher de s'échapper.

Tentant de protéger leur maître, les fléaux mineurs s'élancèrent brusquement vers le duo. Toshiyuki serra subitement ses poings, fracassant les quelques créatures inférieures tout en se frayant un chemin vers le boss désormais cloué et incapable de s'échapper. D'un coup d'emptyness vers le haut, Toshiyuki se propulsa en l'air, histoire d'esquiver la plupart des petits parasites cherchant à le ralentir, et s'offrir une belle vue du boss désormais bloqué contre la lame du faucheur des Sato. Dans le même temps, il pointa son doigt en la direction de la créature, une lumière bleutée commençant à se former sur le bout de son index, signe de l'accumulation de son énergie occulte et de la préparation de son sort.


Dans un bruit d'énergie étrange et presque mystique, la boule occulte fut alors envoyée, éclairant au passage les différents acteurs de cette scène d'une légère teinte bleutée, avant de s'écraser en plein dans le fléau majeur, qui y répondit dans un profond grognement de douleur, mélangé à un espèce de soupir, comme pour marquer la fin de son existence. Redevenant poussière, la créature commença alors à disparaître, la fin de sa vie servant d'appel à la retraite pour les autres fléaux, qui s'échappèrent avec rapidité pour ne pas être attrapé après. Alors que Toshiyuki retombait sur le sol, grommelant à la réception légèrement ratée, l'énergie occulte ambiante sembla se calmer doucement, se reposer, alors que la pièce reprenait lentement une apparence plus classique.

La pièce semblerait reprendre sa taille d'origine, s'agrandissant petit à petit, l'aspect vieillot reprenant lentement place et une odeur, mélange de moisi et de poussière, venait emplir les poumons d'un Toshiyuki fier qui poussa alors un profond grognement en expulsant l'air qu'il venait pourtant d'inspirer avec fierté.


La présence des différents fléaux mineurs se faisait plus diffuse, espacée. Si à l'origine tous semblaient regroupés en un seul bloc, suivant les paroles et mouvements du leader, ils venaient de perdre leur reine, et partaient ainsi chacun de leurs côtés sans réellement savoir ni comprendre. Ils n'allaient bien-sûr pas purger la totalité du lieu, les créatures occultes restantes n'étant clairement pas un problème, surtout répartis non pas sur ce seul temple mais sur la totalité du domaine. Il ne restait donc qu'à faire le point, discuter, rentrer... Si tout était bien terminé, bien entendu.

Dans un domaine de fléau, l'ambiance n'était clairement pas la même qu'à l'accoutumée. L'air était lourd, atroce et en vérité presque gluant, tant il semblait coller à la peau, comme après avoir cuit quelque chose de gras que vous semblez en garder la sensation des heures durant. Ce même air a même un espèce d'arrière goût atroce, comme si vous léchiez le fléau, goutiez à son essence d'un noir d'essence et de malheurs. C'était grâce à tout ça, que Toshiyuki arriva à comprendre que tout était terminé, et que la victoire contre cet adversaire était désormais certain. Parce-que oui, à l'origine, le mouton noir des Umino s'était interrogé sur la véracité de cette sensation, sur la réalité de cette victoire. Une créature si faible qu'elle s'en cachait derrière ses semblables, ne pas avoir une deuxième forme abusée sortie d'un jeu vidéo aléatoire ? En vrai, c'en était presque triste ! Mais au moins, tout s'était terminé sans trop d'accrocs.

Cette victoire, ils la devaient à un certain travail d'équipe, étonnant quand on savait qu'ils ne se connaissaient que depuis quelques heures. Et pourtant, ils avaient directement accrochés, sûrement grâce à leurs passés communs et à leurs désirs d'abattre un cycle sans fin d'échecs et de malchance. Et aux côtés de ce sentiment agréable vint le soleil, qui, comme un ultime spectateur, se levait pour applaudir les deux âmes qui venaient d'occire leurs adversaire. Grâce à la lumière du jour qui filtrait au travers des murs usés par le temps, ils pouvaient mieux discerner la gracieuse architecture de la bâtisse, désormais vide de fléaux.

Les créatures mineures, effrayées par la prouesse des deux exorcistes et la mort de leurs chef, s'étaient échappées, peu de temps après sa défaite, profitant de cet instant pour disparaître dans les méandres des forêts environnante. S'il était clair qu'ils reviendraient séjourner entre ces murs une fois Daisuke et Toshiyuki sur le départ, ils pouvaient néanmoins, durant quelques temps, profiter de l'endroit. Vieillit, moisi, mais qui semblait garder en son sein et en ses murs ce côté presque solennel des temples du pays du soleil levant. Un endroit où il devait très certainement faire bon vivre, et en fermant les yeux, c'est presque comme s'ils pouvaient entendre les prières, les chants des moines désormais disparus.


Grommelant, l'hôte du ver des abysses se releva doucement, se frottant machinalement, cherchant à retirer les quelques stigmates de cet affrontement de ses habits. Sang séché, poussière, moisissure et autres résidus d'énergie occulte, lui qui aimait un minimal de propreté se retrouvait toujours dans un état lamentable après une mission. Il fini par poser ses mains sur ses hanches, poussant un long soufflement de contentement en observant la créature disparaître sous ses yeux, emportant avec elle ses soucis.

Finalement, il se tourna vers son nouveau partenaire et désormais brother, qui se lança dans une magnifique tirade poétique. Bon dieu, mais d'où il sortait l'énergie pour parler en alexandrin là aussi ? Toshiyuki s'approcha et vint le tapoter dans le dos, avant de parler.


Pour le coup, la différence entre les deux était... plutôt drôle. Là où Toshiyuki semblait particulièrement noble dans sa manière de se tenir, une tenue particulièrement propre et immaculée, une droiture de posture et une voix presque chantante, Daisuke, lui, semblait plus rustre, plus fort, plus sauvage. Et pourtant, rien que dans les paroles, c'était bien le grand musclé qui venait de parler avec beauté et charisme là où le soit-disant nobliaux lui proposait presque de se mettre la tête à l'envers à la villageoise.

Attrapant son téléphone, il tapota rapidement un message prévenant de la réussite de la mission, et qu'ils allaient rentrer. Ce qui était sûr, c'était qu'avec cette mission, Toshiyuki s'était trouvé un allié de choix. Quelqu'un qui, dans un sens, comprenait le malheur de sa propre existence, et le problème actuel avec la société occulte. Certes, de son côté, il venait d'une famille plus classique, moins influente, mais c'est aussi de ces deniers que le futur allait se faire. Quelles que soient les difficultés, ils étaient dans le même bateau, et s'ils voulaient s'en sortir ils allaient devoir se serrer les coudes.